Un Geste d'Amour

Maya Corboud, 2017, Suisse
16mm, couleur, français, 11'

Un geste d'amour. Celui de l'archéologue qui exhume une pierre enfouie dans la terre. Les menhirs se dressent et deviennent des objets de désir. Le film de Maya Corboud nous donne à voir dans ces mégalithes des corps immobiles dont la topographie se redéfinit sous le grain de la pellicule 16 mm. Matière sonore et picturale créent un dialogue organique à la temporalité indéfinie.

⏺ Tu as décidé de tourner « Un geste d’amour » en pellicule 16 mm. Peux-tu expliquer ce choix formel?
Je travaille en pellicule dans la plupart de mes travaux. Pour ce film, j’ai tourné avec une caméra Bolex 16mm. J’aime la pellicule pour les limites qu’elle me donne : travailler avec peu de matière, souvent de manière asynchrone. Mais aussi pour sa forme, son grain. Elle a un mouvement organique qui rend plus profond les éléments que je capte dans ce film : le relief de la pierre, le ressac d’une vague.

⏺ Ton cinéma semble être fait de rapprochements, où des images formes et textures sont réunis. Le spectateur trouve sa place dans ces interactions.
En effet je travaille la forme de manière expérimentale, avec des effets de répétitions, de superpositions et de décompositions, peut-être pour y voir autre chose. Voir des gestes d’amour dans ceux des archéologues grattant des restes ensevelis. Voir un corps dans les creux d’une pierre. Je pense aussi à aussi Pollet, avec Trois jour en Grèce. Un film qui mêle plusieurs registres d’images, de sons, et aussi des archives. J’aime sa manière de rapprocher les lieux et les temps.

⏺ La notion de « matière » semble être au centre de ton film. Comment a-tu appréhendé le lien entre corps et nature, et entre son et image?
En tournage, j’ai récolté le son et l’image de manière séparée mais toujours en parallèle. J’ai constitué une matière dont l’enjeu était de rendre compte d’une dimension essentielle et poétique autour du temps et des restes. Le travail était, au moment du montage, de trouver une forme et un mouvement à cette matière hétérogène par rapprochement ou par rupture.

⏺ Ton film se trouve à un carrefour entre cinéma, vidéo et peinture. Comment perçois-tu ce mode de travail plus expérimental dans le circuit plus « classique » du cinéma suisse?
Cette démarche expérimentale vient, je pense, d’une façon de travailler en rhizome. Il n’y a pas de scénario. Je fais des aller-retours entre écriture, tournage et montage. Je développe ainsi un rapport intime avec ma matière. Ce mode de fabrication se rapprocherait plus des films de Peter Liechti par exemple.

Curation et Interview - Lucien Monot

LUFF.FM
LUFF.TV
Join the workshops!